Union des Syndicats de Pharmaciens d'Officine (USPO)

Les Nouvelles de la Pharmaco

Les Nouvelles de la Pharmaco #37

Les dermocorticoïdes 

Traitement de référence des principales dermatoses inflammatoires chroniques

Les dermocorticoïdes sont le traitement de référence des principales dermatoses inflammatoires chroniques notamment pour la dermatite atopique et le psoriasis. Dans le contexte actuel marqué par de nombreuses ruptures de stock à l’officine, il est essentiel de pouvoir proposer une alternative adaptée au prescripteur, en respectant à la fois le niveau d’activité et la forme galénique.

Une classification en dermocorticoïde d’activité faible à très forte

  • Après l’hydrocortisone, premier dermocorticoïde commercialisé dans les années 1950, de nombreux dérivés ont été synthétisés : fluticasone propionate (Flixovate®), désonide (Tridesonit®, Locatop®), diflucortolone valérate (Nerisone®…), bétaméthasone valérate (Betesil®, Betneval®…), bétaméthasone dipropionate (Diprosone®, Diprolène®…), difluprednate (Epitopic®), clobétasol propionate (Dermoval®, Clarelux®, Clobex®…). Ces dermocorticoïdes sont classés en fonction de leur niveau de puissance ou niveau d’activité. Les quatre classes (classification internationale) sont :
    • Classe I = activité faible. La plupart des spécialités sont non listées (sauf Corazed®).
    • Classe II = activité modérée. Tridesonit. Utilisé sur le visage, dans les plis et les zones génitales et avant 2 ans.
    • Classe III = activité forte. Betesil, Betneval, Dermafusone, Diprosalic, Diprosone et génériques, Efficort, Epitopic, Flixovate, Locatop, Locoid, Nerisone, Nerisone Gras. Adapté aux applications sur le corps et après 2 ans.
    • Classe IV = activité très forte. Diprolène, Dermoval, Clarelux, Clobex et génériques. Contre-indiqués chez le nourrisson et le jeune enfant, le visage, les plis et le siège.
  • Classer les dermocorticoïdes par principe actif n’a pas d’intérêt car d’autres facteurs interviennent : sel utilisé, concentration, excipients… Ainsi, le désonide se retrouve dans Tridesonit (classe II) et Locatop (classe III), le bétaméthasone dipropionate, est présent dans Diprosone (classe III) et Diprolène (classe IV).

Des formes galéniques non interchangeables

  • Un même dermocorticoïde peut également exister sous différentes formes galéniques, et celles-ci ne sont pas interchangeables entre elles.
    • Les crèmes s’adaptent à la plupart des situations cliniques, aux lésions suintantes et aux plis.
    • Les pommades s’utilisent sur les lésions épaisses et sèches, pas dans les plis pour éviter la macération.
    • Les lotions, gels, shampooings et mousses s’appliquent sur le cuir chevelu et les régions pileuses.
    • La forme emplâtre (Betesil) est destinée aux lésions de psoriasis dans des zones difficiles (coudes, genoux, tibias).       

Une action anti-inflammatoire et anti-proliférative 

  • Les dermocorticoïdes sont le traitement de référence des principales dermatoses inflammatoires chroniques comme la dermatite atopique et le psoriasis.
  • Les dermocorticoïdes sont à la fois anti-inflammatoires, vasoconstricteurs, immunosuppresseurs et anti-mitotiques (donc anti-prolifératifs). Ils ciblent l’ensemble des cellules présentes dans la peau : leucocytes, cellules endothéliales, fibroblastes, mélanocytes, kératinocytes…
  • Leurs effets indésirables sont liés à leur mode d’action : atrophie cutanée (action sur les fibroblastes), dépigmentation (action sur les mélanocytes), risque infectieux cutané (immunosuppression), etc…
  • Les dermocorticoïdes sont également utilisés dans les dermatoses bulleuses, lupus cutané, cicatrices hypertrophiques ou chéloïdes, lichen plan, lichen scléro-atrophique vulvaire, mais aussi dans des affections plus transitoires comme les piqûres d’insectes ou les érythèmes solaires.

Arrêt progressif en cas de traitement prolongé

  • La durée de traitement est variable. Si le traitement dure quelques jours (eczéma), il peut être arrêté brutalement sans décroissance progressive (traitement on-off). Si le traitement dure plusieurs semaines (psoriasis), il doit être arrêté progressivement pour éviter un effet rebond.
  • En général, une application par jour suffit grâce au stockage du dermocorticoïde dans la couche cornée et à son relargage progressif.
  • Dans le psoriasis ou l’eczéma, un traitement d’entretien deux à trois fois par semaine permet d’éviter les rechutes. Il faut redémarrer le traitement quotidien en cas de nouvelle poussée.
  • Les dermocorticoïdes s’appliquent en couche fine en massant légèrement.

Attention aux phénomènes d’occlusion

  • Les dermocorticoïdes sont contre-indiqués sur les dermatoses infectieuses (primitives bactériennes, virales dont varicelle et herpès, fongiques ou parasitaires), ulcérées ou faciales (acné, rosacée, dermite péri-orale) pour éviter leur aggravation.
  • L’occlusion augmente la température et l’humidité locales, d’où un risque de majoration des effets indésirables. Attention chez le nourrisson à l’occlusion accidentelle dans les plis et sous la couche. Chez l’adulte, l’occlusion est parfois utilisée volontairement sur des lésions très épaisses et résistantes.
  • Une hypersensibilité (ou allergie) à la molécule active est rare mais possible.

Des effets indésirables en cas d’utilisation inappropriée

  • Les effets indésirables locaux sont plutôt rares, mais favorisés par une utilisation prolongée et parfois inappropriée des dermocorticoïdes :
    •  effet antiprolifératif : atrophie cutanée, vergetures, retard de cicatrisation, troubles de la pigmentation,
    • effet immunosuppresseur favorisant les infections cutanées,
    • hypertrichose, acné, rosacée, dermite péri-orale, télangiectasies…
  • Contrairement aux idées reçues, les dermocorticoïdes ne sont pas photosensibilisants.
  • Les dermocorticoïdes peuvent contenir des excipients comme du propylèneglycol, de l’alcool cétylique et de l’acide sorbique qui peuvent provoquer une dermatite de contact, et des parabens (perturbateurs endocriniens). Leur utilisation chez le nourrisson et l’enfant doit toujours se faire de façon raisonnée.
  • D’après le CRAT (Centre de Référence sur les Agents Tératogènes), les corticoïdes peuvent être utilisés chez la femme enceinte et allaitante, quelles que soient leurs voies d’administration, leurs posologies, la durée du traitement et le terme de la grossesse.

Attention à la corticophobie

  • La corticophobie correspond à la crainte, la peur, voire le refus d’utiliser des dermocorticoïdes. C’est un facteur majeur d’inobservance qui s’ajoute aux contraintes pratiques liées à la voie locale cutanée.
  • La corticophobie résulte d’un mélange de méconnaissance des maladies cutanées et de leur prise en charge, d’amalgame avec la voie systémique et d’idées reçues. Les médias, les notices, l’entourage ainsi que les réseaux sociaux entretiennent ce climat de peur.
  • Les professionnels de santé doivent entendre les peurs des patients et y répondre de façon claire.