
Biosimilaires : un dispositif gagnant pour les patients,les pharmacies et l’Assurance Maladie
Magazine Officines Avenir n°33 – Avril 2025 – Temps de lecture : 4min
L’année 2025 marque un tournant majeur dans la substitution des médicaments biologiques similaires par les pharmaciens. Alors que seulement deux molécules étaient substituables en 2024, ce nombre grimpe à neuf cette année. Une avancée qui témoigne de la confiance accordée aux officinaux et de leur rôle clé dans la maitrise des dépenses de santé tout en assurant une prise en charge optimale des patients.
Une substitution élargie et encadrée
L’ANSM, par un avis favorable fin 2024, a validé la substitution pour sept nouvelles molécules. Cette avancée a été confirmée par l’arrêté publié le 27 février 2025, qui consacre l’élargissement du champ de substitution des biosimilaires. Comme pour les génériques, les pharmacies participent activement à la réduction du déficit de la Sécurité sociale tout en garantissant une meilleure disponibilité des traitements.
La substitution repose sur une information partagée entre médecins, pharmaciens et patients. L’arrêté prévoit ainsi des obligations précises :
- Le prescripteur informe le patient de la possibilité de substitution.
- Le pharmacien explique au patient la substitution effective et les modalités associées (règles de conservation, administration, etc.).
- Le nom du médicament dispensé est mentionné sur l’ordonnance (ex : impression verso).
- Le pharmacien informe le prescripteur du médicament dispensé (ex : historique de remboursement dans le DMP).
- Un enregistrement du nom et du numéro de lot du biosimilaire est requis pour assurer la traçabilité (ex : traçabilité LGO).
- La continuité de la dispensation du même médicament est garantie
La substitution des biosimilaires n’entraîne aucune perte financière pour les pharmaciens, la marge étant identique entre le bio référent et le biosimilaire. Toutefois, aucune incitation économique n’est effective à ce jour, et la ROSP dédiée est proche de zéro.
Sécurité et acceptabilité des patients
Les molécules substituables ont un brevet échu d’au moins deux ans en France, et bientôt un an avec l’amendement de la LFSS 2025 impulsé par l’USPO et porté par la sénatrice Corinne Imbert. Cette réduction du délai permet une substitution plus précoce, renforçant ainsi la compétitivité du marché et les économies pour le système de santé.
L’acceptabilité des biosimilaires est un enjeu majeur. Selon un sondage IFOP 2024, 55 % des Français soutiennent leur développement. De plus, 83 % des patients accepteraient un biosimilaire si leur professionnel de santé le leur proposait (ONB 2024). Pourtant, la sensibilisation reste à renforcer : 50 % des patients sous biothérapie n’ont jamais entendu parler des biosimilaires et estiment ne pas avoir reçu un accompagnement suffisant.
Des outils sont disponibles pour accompagner les patients et les professionnels de santé :
- Des fiches d’information patients et professionnels accessibles sur www.biomedinfo.fr.
- Des capsules vidéos qui seront prochainement mises à disposition par l’USPO.
- Des dispositifs d’administration factices fournis par les laboratoires.
Le rôle du pharmacien dans la dispensation
L’expertise du pharmacien est essentielle pour garantir la bonne compréhension et l’adhésion du patient à son traitement. Les médicaments biologiques sont principalement injectables et existent sous diverses formes (seringue, stylo auto-injectable). Certaines différences existent, notamment au niveau du volume injecté, influant sur la douleur perçue à l’injection. L’ergonomie des dispositifs doit être expliquée au patient :
– Bouton de pression ou non (stylo auto-injecteur),
– Fenêtre de visualisation,
– Dose unique ou ajustable.
Le groupe biosimilaire de l’adalimumab (Humira®), par exemple, comprend désormais neuf présentations différentes. Une information claire et un accompagnement adapté sont donc nécessaires et indispensables.
Des groupes exclus de la substitution
Les insulines (aspartate, glargine et lispro) ont été exclues pour le moment de la substitution en raison des risques d’erreurs graves en prescription, dispensation et administration. Ces erreurs figurent parmi les « never events », incidents médicaux graves évitables. L’incompatibilité entre certaines insulines et les pompes, ainsi que la nécessité d’une formation spécifique des patients, ont également motivé cette décision.
De même, la somatotropine avait déjà été exclue en 2022 après un avis défavorable de l’ANSM.
Des économies substantielles pour l’Assurance Maladie
L’Assurance Maladie anticipe 90 millions d’euros d’économies en 2025 grâce à la substitution des biosimilaires. Pourtant, le taux de pénétration des biosimilaires reste inégal :
– 87 % pour l’époétine (Eprex®),
– 67 % pour la follitropine alfa (Gonal-F®) et le tériparatide (Forsteo®),
– 59 % pour l’adalimumab (Humira®) et l’étanercept (Enbrel®),
– 20 % pour l’enoxaparine (Lovenox®).
À l’hôpital, ce taux grimpe à 94 %, témoignant d’un levier d’optimisation encore sous-exploité en ville. En dix ans, les biosimilaires ont déjà généré 3 milliards d’euros d’économies, et leur potentiel est estimé à 6 milliards d’ici 2030.
Perspectives : un engagement à préserver
Après l’égalité de marge obtenue pour les biosimilaires, la profession attend désormais des remises accordées sur ces molécules, sans impact négatif sur d’autres segments. L’USPO demeure vigilante face à la tentation du gouvernement d’instaurer un système de « vases communicants » entre génériques et biosimilaires, dans un contexte de déficit de la Sécurité sociale de 23 milliards d’euros.
D’autres biosimilaires pourraient substituer des bioréférents dans quelques mois : Eylea®, Roactemra®, Stelara®.
Le développement des biosimilaires est une opportunité pour la santé publique et l’équilibre budgétaire de l’Assurance Maladie. Les pharmaciens d’officine, acteurs incontournables de cette transformation, doivent être pleinement reconnus et soutenus dans leur mission d’accompagnement et de sécurisation des traitements biologiques.
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