Union des Syndicats de Pharmaciens d'Officine (USPO)

Mobilisation 2025

Grève des pharmacies de l’été 2025 : retour sur une mobilisation d’ampleur inédite

En bref

La mobilisation des pharmaciens de l’été 2025 a été déclenchée en juin par la décision du gouvernement de diminuer drastiquement le plafond des remises commerciales sur les médicaments génériques.

Cette baisse, décidée unilatéralement par le gouvernement sans réelle concertation avec la la profession, était un risque important pour la viabilité des pharmacies du fait de l’importance du poids de ces remises dans leurs revenus, et mettait en péril immédiat le tiers du réseau officinal, soit 5 000 à 6 000 pharmacies, ainsi que les 146 000 emplois directs du secteur.

Les fermetures économiques d’un nombre important de pharmacies auraient entraîné la création de déserts pharmaceutiques et la dégradation de l’accès aux soins de proximité pour les patients.

L’objectif de la mobilisation était donc la suspension immédiate des arrêtés ministériels litigieux et l’ouverture d’une négociation structurelle, notamment avec l’Assurance Maladie, sur la rémunération en pharmacie pour garantir la pérennité du modèle économique de l’officine.

La mobilisation a été extrêmement suivie en 2025 : 

Une négociation sur le mode de rémunération de la profession pour assurer la pérennité de l’économie officinale et surtout préserver le maillage territorial est en cours dans le PLFSS 2026.

Contexte : une profession en difficulté économique

Le facteur déclencheur de la crise fut la proposition gouvernementale de réduire drastiquement le plafond des remises commerciales que les laboratoires de médicaments génériques peuvent accorder aux pharmacies. 

Initialement, le projet prévoyait de faire passer ce plafond de 40% à une fourchette de 20-25%, avant qu’un arbitrage interministériel ne fixe la cible à 30%. Pour le réseau officinal, cette mesure représentait une perte sèche estimée à 600 millions d’euros, impactant en profondeur la gestion économique des pharmacies.

Ces remises sont aujourd’hui un pilier structurel de l’économique des officines. Elles représentent jusqu’à 30% de l’Excédent Brut d’Exploitation (EBE), un chiffre qui peut être encore plus élevé pour les pharmacies rurales, plus fragiles. Une analyse du cabinet d’expertise comptable CGP quantifie cet impact : pour une officine moyenne, la remise à 40% équivaut à un revenu d’environ 78 000 euros, soit 30,10% de son EBE. La réduire revient donc à amputer directement la capacité de l’entreprise à fonctionner et à réinvestir dans la qualité de soins.

La principale menace liée à cette mesure était le risque d’une désertification pharmaceutique accélérée. Les syndicats ont alerté sur la mise en péril de 5 000 à 6 000 pharmacies, soit près d’un tiers du réseau national. Cette menace pèse non seulement sur l’accès aux soins pour des millions de citoyens, mais aussi sur un secteur qui représente 146 000 emplois qualifiés et non délocalisables.

Face à une menace jugée existentielle et le mode de décision unilatérale du gouvernement sans concertation avec les représentants syndicaux, la profession a unifié sa réponse, orchestrant une mobilisation dont l’ampleur restait inédite pour les métiers de la pharmacie.

Soulignant l’enjeu existentiel de la question, le mouvement a dépassé les barrières du monde syndical, entraînant une union sacrée de toute la profession, même non syndiquée, et sans distinction d’appartenance.

Actions de l’été 2025 : chronique d’une mobilisation inédite

Mai – Juin 2025 : les prémices de la contestation
Juillet 2025 : début du mouvement

Le mouvement s’est durci en juillet, passant de l’avertissement à l’action directe. La mobilisation a été visible dès le 1er juillet avec une manifestation interprofessionnelle à Paris, au « Village des professionnels de santé trahis ». 

La réponse gouvernementale, perçue comme une provocation, est intervenue le 3 juillet : un arrêté prolongeant le plafond de 40% pour un mois seulement. Qualifiant cette décision de « piétinement », l’intersyndicale a répliqué le 17 juillet par l’annonce d’un plan d’action commun beaucoup plus offensif.

Ce plan incluait la poursuite de la grève des gardes et une grève du tiers payant pendant les réquisitions, mais surtout, il brandissait la menace de la fermeture complète des pharmacies le 18 septembre, suivie de la fermeture complète tous les samedis à compter du 27 septembre 2025.

Août 2025 : fermeture symbolique et action juridique

La publication de l’arrêté du 4 août, fixant les plafonds à 30% pour les génériques et 15% pour les biosimilaires, a agi comme catalyseur pour la mobilisation estivale.

Le point d’orgue de la mobilisation estivale fut journée de fermeture du samedi 16 août. Son succès fut retentissant : selon un sondage de l’USPO, 92% des pharmacies prévoyaient de fermer. L’action était une démonstration politique, pas punitive, visant à illustrer auprès du grand public et des décideurs politiques l’impact que représenterait la disparition des pharmacies de proximité. Parallèlement, le soutien populaire s’est affirmé, avec une pétition nationale dont le nombre de signataires approchait les 200 000 mi-août.

Septembre : Mobilisation massive et suspension de l’arrêté

Le mois de septembre a débuté par l’application effective des mesures gouvernementales qui avaient déclenché la crise, l’arrêté du 4 août entrant en vigueur le 1er septembre.

Le 3 septembre, les représentants de la profession (Ordre, syndicats, groupements, étudiants) se sont réunis pour définir une position commune. Ils ont été reçus le même jour par les cabinets de la ministre du Travail (Mme Catherine Vautrin) et du ministre de la Santé (M. Yannick Neuder).

Le 4 septembre, l’USPO a été reçue à Matignon mais a exprimé une « déception immense » et une « incompréhension déstabilisante » face au cabinet du Premier ministre, qui contestait les chiffres syndicaux sur l’impact économique.

Résultats et devenir de l’action

La pression exercée par la profession a porté ses fruits, forçant une reprise du dialogue avec le sommet de l’État.

  • Négociations au sommet : Le 24 septembre 2025,
    • et les syndicats représentatifs ont été reçu à Matignon, une reconnaissance politique de la gravité de la crise et de la légitimité du mouvement.

  • Suspension de l’arrêté : Le 25 septembre, la profession a obtenu une « victoire majeure ». Le gouvernement a annoncé la « suspension tant attendue » de l’arrêté du 4 août. Cette décision, qui désamorce la menace économique immédiate, est la preuve directe de l’efficacité de la mobilisation.
  • La revendication centrale : un « avenant 2 » à la convention pharmaceutique

L’objectif de la profession est désormais d’obtenir l’ouverture de négociations pour une refonte en profondeur du modèle de rémunération. La finalité est de bâtir un nouveau modèle, moins dépendant des prix et des volumes de médicaments, qui valorise enfin à leur juste valeur les missions de santé publique assurées par les pharmaciens : prévention, dépistage, suivi des patients chroniques, etc.

  • Un plan d’escalade stratégique en réserve 

Approfondissement : les remises sur génériques, un enjeu central